Noctuelle terricole (Agrotis ipsilon) : dégâts et lutte biologique

Présente dans de nombreuses cultures légumières et grandes cultures, la chenille de la noctuelle terricole (Agrotis ipsilon) s’attaque aux semis comme aux jeunes pousses. Découvrez comment l’identifier et quelles méthodes naturelles curatives et préventives adopter pour protéger vos cultures.

Description de la noctuelle terricole (Agrotis ipsilon)

Agrotis ipsilon est aussi nommée noctuelle terricole ou noctuelle baignée. Il s’agit d’un lépidoptère qui appartient au genre Agrotis et à la famille des Noctuinae.

Cosmopolite, ce papillon s’est installé sur tous les continents et trouve dans les zones cultivées un terrain de jeu idéal. On la surnomme souvent le ver gris noir, car c’est au stade larvaire que les dégâts se font sentir. La chenille, d’un gris terne, marquée de points noirs, et d’une tête brun à jaunâtre, se replie sur elle-même lorsqu’on la touche et passe ses journées enfouie dans le sol, d’où elle sort la nuit pour ronger les jeunes plants à leur base.

L’adulte est un papillon nocturne d’environ 45 mm d’envergure. Ses ailes brunes présentent une tache plus claire marquée d’un petit triangle noir, signe distinctif de l’espèce. Si ses vols peuvent paraître anodins, ils annoncent souvent des pontes nombreuses : chaque femelle peut produire jusqu’à 1 500 œufs, déposés par petits paquets sur un sol humide et travaillé récemment.

Une espèce migratrice difficile à contenir

La noctuelle terricole fait partie des ravageurs les plus mobiles. Espèce migratrice, elle voyage sur de longues distances au gré des vents chauds. Dès le printemps, les populations venues du sud de l’Europe gagnent progressivement le nord. Ce déplacement s’accompagne de plusieurs générations successives, rendant la surveillance continue indispensable.

En France, on observe une quasi-disparition en hiver, les papillons adultes ne survivant pas au froid. La réapparition s’effectue dès la fin mars dans les régions méridionales, notamment le long du littoral méditerranéen. De là, les individus se reproduisent, et leurs descendants migrent vers le nord jusqu’à la fin de l’été, avant d’entamer un retour vers le sud. Ce cycle migratoire rend difficile toute stratégie unique de lutte : chaque saison voit revenir de nouvelles vagues d’individus.

Cycle biologique de Agrotis ipsilon

La compréhension du cycle de Agrotis ipsilon est la clé d’une gestion efficace.

• Œufs : déposés en groupes de 10 à 15 sur un sol humide, ils éclosent en 4 à 5 jours.
• Larves : la croissance s’étale sur 45 à 60 jours selon la température. C’est la phase ravageuse du cycle.
• Nymphose : elle se déroule dans le sol, où la larve se transforme en chrysalide.
• Adultes : actifs à la tombée de la nuit, ils assurent la reproduction et la dispersion.

Les chenilles sont strictement nocturnes. Elles attaquent les tiges, feuilles ou collets des plantes, souvent en rasant les semis à la base. Le jour, elles s’enfouissent dans le sol, échappant ainsi aux prédateurs et aux traitements de surface.

Les conditions favorables à leur développement sont bien connues : chaleur, humidité et faible luminosité. Deux pics d’activité marquent l’année : de mai à juin, puis d’août à octobre, correspondant à deux générations principales.

Des cultures variées sous menace

La noctuelle terricole s’attaque à une multitude de plantes hôtes. Elle affectionne tout particulièrement les graminées, les solanacées (comme la pomme de terre ou la tomate), mais aussi les céréales, betteraves, oignons, laitues, chicorées, tabacs ou asperges.

Dégâts causés par la noctuelle terricole

Les symptômes sont caractéristiques :

• feuilles rongées, parfois jusqu’aux nervures ;
• tiges sectionnées net au niveau du collet ;
• plants affaiblis ou desséchés ;
• dégâts visibles dès le matin après une nuit d’activité larvaire.

Sur les pelouses et gazons, la noctuelle peut aussi causer des dégâts esthétiques et économiques, notamment sur les terrains de golf, où elle laisse des zones circulaires dénudées. Dans les champs, les pertes peuvent être considérables : les jeunes semis disparaissent parfois sur des surfaces entières en quelques jours.

Prévenir plutôt que guérir

Avant toute chose, la prévention repose sur l’observation régulière et la gestion du sol. La femelle choisit de préférence des zones fraîches, humides et récemment travaillées pour pondre. Ces conditions sont fréquentes après un labour ou un arrosage, d’où l’intérêt de planifier les travaux du sol en dehors des périodes de vol connues.

Les résidus de culture, les mauvaises herbes et les débris végétaux constituent autant de refuges pour les larves. Leur destruction limite les possibilités d’abri et réduit naturellement la population. Sur certaines exploitations, la mise en place de bandes enherbées ou de zones refuges ciblées permet aussi de canaliser la présence des papillons tout en préservant les auxiliaires.